La conciliation et la médiation internationales à la CPA
Ces dernières années, la conciliation, la médiation et d’autres alternatives à l’arbitrage ont reçu une attention accrue de la communauté internationale. Bien que les arbitrages constituent la majorité des affaires sous les auspices de la CPA, la CPA se tient prête à faciliter les conciliations et les médiations lorsque ses usagers estiment que ces procédures sont appropriées pour résoudre leurs litiges.
Photo : Signature du nouveau Traité sur les frontières maritimes entre le Timor-Leste et l’Australie le 6 mars 2018 à New York en présence du Secrétaire général de l’ONU, S.E. Antonio Guterres, et de la Commission de conciliation (affaire CPA n° 2016-10).
Ces dernières années, la conciliation, la médiation et d’autres alternatives à l’arbitrage ont reçu une attention accrue de la communauté internationale. Depuis 2017, le Groupe de travail III de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international étudie les préoccupations suscitées par le système de règlement des différends entre investisseurs et États et a examiné l’opportunité de certaines réformes. La Convention des Nations Unies sur les accords de règlement internationaux issus de la médiation (communément appelée la « Convention de Singapour ») est également entrée en vigueur en 2020.
Bien que les arbitrages constituent la majorité des affaires sous les auspices de la CPA, la CPA se tient prête à faciliter les conciliations et les médiations lorsque ses usagers estiment que ces procédures sont appropriées pour résoudre leurs litiges. En effet, la conciliation et la médiation sont ancrées dans l’histoire de la CPA. Les Conventions de La Haye pour le règlement pacifique des conflits internationaux de 1899 et 1907 reconnaissent la médiation, ainsi que les bons offices et les commissions d’enquêtes pour l’établissement des faits, comme des alternatives importantes à l’arbitrage contraignant. La « conciliation » a émergé de l’approche adoptée par la commission d’enquête dans l’Affaire du Dogger Bank entre la Grande-Bretagne et la Russie que la CPA a facilitée en 1905 (affaire CPA n° 1904-02).
La conciliation implique la nomination d’un conciliateur neutre ou d’une commission composée de personnes en qui les parties ont confiance et qui disposent d’une compétence dans les questions juridiques et factuelles en l’espèce. La commission peut examiner avec les parties les circonstances du différend, émettre une opinion objective concernant le droit applicable et toute question de fait en litige ainsi que consulter les parties s’agissant des domaines de compromis ou de règlement potentiels. Finalement, si les parties ne parviennent pas à un accord au cours de la procédure, la commission présentera généralement un rapport aux parties, dans lequel peuvent figurer ses recommandations pour le règlement de leur différend. Toutefois, contrairement à l’arbitrage, la conciliation ne rend pas de décision contraignante pour les parties.
En 1937, une décision du Conseil administratif a formellement intégré la conciliation dans le domaine d’activités de la CPA. Suite à cette décision, la CPA a facilité trois commissions de conciliation entre les Gouvernements du Danemark et de Lituanie (affaire CPA n° 1937-01), de France et de Suisse (affaire CPA n° 1954-01), ainsi que de Grèce et d’Italie (Conciliation concernant le navire Roula, affaire CPA n° 1955-01). En 1962 et 1996, la CPA a adopté des règlements de procédure afin de permettre aux parties d’initier rapidement un processus de conciliation.
Plus récemment, entre 2016 et 2018, la CPA a apporté son soutien à la procédure de conciliation relative à la frontière maritime entre le Timor oriental et l’Australie. La conciliation a été engagée conformément à l’article 298 et l’annexe V de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (« CNUDM »). S’inspirant en partie du Règlement facultatif de la CPA pour la conciliation (1996), la procédure a été flexible, avec pour objectif de renforcer la confiance entre les Parties et de faciliter le règlement amiable du différend. Suite à de nombreuses réunions entre la Commission de conciliation et les Parties, le Timor-Leste et l’Australie ont conclu un nouveau Traité sur les délimitations des frontières maritimes en 2018, réglant définitivement leur différend.
La Conciliation concernant la mer du Timor démontre les avantages potentiels qu’offre la conciliation aux parties à un différend. Elle permet notamment aux parties et au conciliateur d’explorer des problématiques et intérêts allant au-delà des droits purement juridiques. Par exemple, une commission de conciliation peut prendre en compte les intérêts communs que partagent les parties au différend. De plus, la procédure peut comprendre des consultations informelles ex parte afin de favoriser l’identification de ces intérêts. En effet, dans son rapport, la Commission dans la Conciliation concernant la mer du Timor a noté que les discussions les plus importantes avec chaque Partie n’auraient pas eu lieu dans le cadre de séances plénières.
Les parties en litige font recours à la conciliation pour de nombreuses raisons. La flexibilité de procédure de la conciliation peut encourager les parties à identifier les intérêts qu’elles partagent et donc à parvenir à un accord prenant en compte les différends passés tout en préservant leur relation future. Alors que la communauté internationale continue à examiner différentes modalités de règlement des différends internationaux, la CPA demeure prête à fournir tout soutien technique et administratif dont des parties en litige pourraient avoir besoin.